Comment conserver l'Abeille Noire ?
Préambule
Depuis les années 80, les apiculteurs ont cherché par tous les moyens à obtenir des abeilles plus productives. Or le "toujours plus" a un prix et malheureusement dans notre cas, des conséquences inverses au but recherché. Moins de 25 ans plus tard, cette course à l'abeille martienne allait faire payer un lourd tribu aux abeilles endémiques (abeille noire française)..
Alors que chez les pros, une colonie qui ne produisait pas 50 kilos de miel dans sa saison était abandonnée, ou "recyclée", la moyenne de production dépassait les 100Kg /ruche sans trop d'efforts... Pour gagner plus, il fallait produire davantage..
Par sa cupidité, l'apiculteur a donc contribué au déclin de notre abeille endémique, abeille qui était installée dans nos contrées ben avant l'apparition de l'homme. Est-ce pour autant une punition irréversible ?
La réponse à cette question se mesure à l'échelle d'une génération humaine. Oui si un effort collectif n'est pas pris en considération, Non si tel est le cas, mais il faudra en payer le prix pour lutter contre le fléau principal des hybridations (métissages).
L' apiculture de Loisir
Depuis les années 85-90, l'apiculture de loisir est montée en flèche pour atteindre son apogée dans les années 2015. Et alors que cette génération d'apiculteurs aurait dû être la "gardienne du temple" pour sauver l'Abeille Noire, elle s'est laissée endormir par des discours non fondés, dont celle d'une mauvaise réputation d'abeille "agressive".
L'abeille Noire n'a jamais été une abeille agressive (lire cet autre article), en revanche, il est vrai, quand on croise une Noire avec une Buckfast ou pire, une abeille italienne... chaud devant !
Comme les importations d'abeilles devenaient légion, les croisements n'ont pas du tout amélioré la conjoncture apicole.
La fécondation des reines
Comme tout un chacun le sait, la fécondation d'une reine se fait uniquement en vol libre (bien entendu, en dehors des laboratoires d'insémination)..Finie donc l'époque où l'apiculteur pouvait créer ses essaims et les laisser au cœur de son rucher pour que les reines se fassent féconder sur place. Au besoin, les mâles des ruchers voisins pouvaient s'immiscer lors de ces vols nuptiaux et la variété d'Abeille Noire était bien conservée car tous les apiculteurs ne possédaient que cela dans leur grande majorité.
De nos jours, ce n'est plus du tout le cas car plus de 90% des apiculteurs détiennent de l'abeille Buckfast (ou ce qu'il en reste car elle a très fortement décliné du fait que c'est un hybride), de la Carnica, de la Caucasienne ou encore de l'Abeille noire espagnole (apis mellifera Iberica). Comment peut-on imaginer qu'une reine Noire ne se fasse pas féconder par les mâles exogènes des ruchers voisins ? Effectivement, sur les 10 à 12 mâles géniteurs, une forte proportion sera composée de mâles d'une autre variété que celle de l'Abeille Noire. Pour bien faire, il faudrait que tout un territoire ne comprenne que des ruchers d'Abeille Noire.
C'est là qu'il est indispensable de comprendre ce qu'il va en coûter aux détenteurs de notre race endémique pour parvenir à maintenir leurs souches payées généralement au prix fort (et pour cause, quand on sait ce qu'il en coûte pour l'instant à les maintenir).
La technique du rucher éphémère de fécondation
Mise au point par Bernard NICOLLET de 2005 à 2010, cette technique est très fiable quand elle est appliquée à la lettre. Mais pour y parvenir, il est indispensable qu'un certain nombre d'éléments soient pris en considération et maîtrisés:
- - Le cycle biologique des reines
- - Le cycle biologique des faux-bourdons
- - La création d'essaims artificiels
- - L'établissement d'une traçabilité des colonies qui serviront pour leurs géniteurs
Pour prendre un exemple, si vous habitiez le Maroc, où serait-il l'idéal pour faire féconder vos reines ? Réponse: le désert bien sûr car pas un apiculteur n'aura l'idée saugrenue d'aller y mettre un rucher ! et donc, si vous venez en temps et en heure faire féconder vos reines, avec les mâles que vous aurez choisi, alors vous parviendrez à préserver vos souches de race pure, de façon tout à fait naturelle.
Nous disposons de 2 hautes chaînes de montagne, de vastes forêts, de nombreuses vallées qui pourraient être exploitées hors périodes de transhumances etc. Alors OUI, si vous habitez le Nord de la France, il risque de vous en coûter plus cher que pour un apiculteur qui se trouverait dans les hautes Alpes, mais peut-être pourriez-vous à contrario exploiter les zones de falaises de la manche. En cherchant bien, vous trouverez, mais justement, pour ce faire, il est INDISPENSABLE de comprendre que vous n'emmenez pas vos essaims pour s'implanter dans un endroit afin d'y produire du miel ! vous êtes là tout au plus pour une semaine (grand maximum)